Le Général Albert Niessel, président de la Commission interalliée de contrôle (1919)
Né le 24 octobre 1866 à Paris 1er, Henri Albert Niessel était entré à l’Ecole Spéciale Militaire de Saint-Cyr le 31 octobre 1884.
Gilles Dutertre
10/30/20254 min lire


Né le 24 octobre 1866 à Paris 1er, Henri Albert Niessel était entré à l’Ecole Spéciale Militaire de Saint-Cyr le 31 octobre 1884. A partir du grade de sous-lieutenant, ses affectations successives le conduisirent principalement sur les théâtres d’opération d’Afrique du nord. A la déclaration de guerre, il commanda le 4e régiment de Zouaves, puis, par intérim, la 121e Brigade d’Infanterie. Du 22 août 1917 au 26 mai 1918, il fut chef de la Mission Militaire Française en Russie avant de commander le XIe Corps d’Armée à partir du 3 juin 1918.
Mais, le 24 octobre 1919 en fin d’après-midi, le général de Corps d’Armée (depuis le 21 mai 1919) Albert Niessel était en inspection à Limoges lorsqu’on lui transmit un message lui enjoignant de se présenter le lendemain matin au président du Conseil - ministre de la Guerre, Georges Clemenceau. La seule orientation quant à la mission était la nécessité d’apporter des effets chauds ! Le lendemain, le général reçut la présidence de la Commission interalliée chargée du contrôle de l’évacuation des Provinces Baltiques par les troupes allemandes.
La Commission, outre son président, le général Niessel, était constituée du général de brigade Marietti (Italie), du brigadier-général Turner (Grande-Bretagne), du brigadier-général Cheney (Etats-Unis) et du commandant breveté Takéda (Japon).
Après la paix de Brest-Litovsk avec les Bolcheviques (3 mars 1918), les Allemands occupaient les territoires des trois États Baltiques. Leur intention était d’installer à leur tête des princes allemands inféodés à l’empire germanique. La victoire alliée réduisit ce rêve à néant. Mais l’armistice du 11 novembre 1918 leur fit obligation de rester en place dans les territoires qu’ils occupaient pour éviter que les Bolcheviques ne s’engouffrent dans le vide créé par un éventuel retrait, les gouvernements nationaux ne disposant pas encore de troupes organisées.
Le Traité de Versailles, signé le 28 juin 1919 (L'article 433 du traité de Versailles : Cette disposition a explicitement annulé les termes du traité de Brest-Litovsk, mettant ainsi fin à l'occupation et à l'influence allemande dans les pays baltes.), imposait aux allemands de quitter les Pays baltes. Le problème, en octobre 1919, c’est que les troupes allemandes du général von der Goltz occupaient toujours la Courlande. Le problème bis, comme le soulignait le capitaine Vanlande, c’est que la Commission ne disposait, pour chasser les Allemands, que « du prestige de l'Entente, puis de nos ordonnances, secrétaires, porte-plume, machines à écrire et de quatre caisses d'archives » !
Le 5 novembre 1919 à 22 heures, les wagons qui allaient devenir pendant quelques temps les bureaux, chambres à coucher, restaurant et salle de conférence de la Commission, quittèrent la Gare du Nord à Paris pour Berlin. La Commission arriva à Berlin le 7 novembre et y restera jusqu'au 11 novembre, rencontrant le 10 novembre Gustav Noske, ministre de la Guerre allemand. Au cours de cette rencontre, M. Noske subira indubitablement l'ascendant de la Commission, le général Niessel lui exprimant clairement que « L'Entente a demandé le maintien des troupes allemandes en Baltique quand elle le jugeait convenable. Elle demande aujourd'hui qu'elles s'en aillent : c'est son droit ».
Le train de la Commission quitta Berlin le 11 novembre pour Königsberg, puis pour Tilsit où elle arriva le 13 novembre 1919 au matin. On se rappellera qu’à cette époque, les Germano-Russes de Bermondt-Avaloff étaient en pleine retraite devant les Lettons après avoir été battus à Riga grâce notamment à l’intervention de la flotte franco-britannique aux ordres du Capitaine de Vaisseau Brisson.
Après avoir effectué des navettes entre Tilsit et Memel (Klaipėda), le train de la Commission arriva difficilement à rejoindre Šiauliai. Son dessein était de faire cesser toutes les attaques (lettones et lituaniennes) afin de permettre l’écoulement des troupes germano-russes vers la Prusse orientale. Tout en faisant peser sur celles-ci l’épée de Damoclès d’une poursuite menaçante, épée de Damoclès d’autant plus nécessaire que le général allemand von Eberhardt, commandant le VIe Corps de réserve allemand, faisait preuve de duplicité.
Pour l’anecdote, un soir, du côté de Šiauliai, un soldat allemand demanda à voir la Commission ! Il s’agissait en fait d’un Lorrain, originaire de Thionville, que les hasards de la guerre avaient promené en Ukraine et en France, puis qui s’était laissé séduire par l’aventure baltique. Mais il en avait assez car il n’était plus payé et sa zone de pillage s’appauvrissait de jour en jour. Il voulait s’engager dans la Légion Étrangère !
Le 27 novembre, le colonel Dosse, chef d’Etat-major de la Commission, rencontra une délégation lettone constituée d’un représentant des Affaires Etrangères, ancien étudiant à la Sorbonne, et d’un colonel de l’état-major letton. Le wagon-restaurant du train de la Commission servait de double salle de réunion, une cloison séparant la délégation lettone de l’Officier allemand envoyé par le général von Eberhardt. Celui-ci, qui demandait un allégement des conditions de retraite, n’obtiendra qu’un accroissement des rigueurs ! Il lui fut notamment stipulé que les Lettons accompagneraient, par des éléments légers, les troupes germano-russes jusqu’à la frontière letto-lituanienne. La vitesse d’évacuation devrait être accélérée, tous les éléments germano-russes devant se trouver rassemblés sur une ligne Mouravievo – Kurchany (A priori ligne Mažeikiai - Kuršėnai) au plus tard le 1er décembre.
Les dernières formations allemandes arrivèrent enfin à la frontière lituanienne et le 30 novembre 1919 à minuit, la Courlande était entièrement libérée.
Comme le stipule sa citation à l’ordre de l’Armée, signée le 13 janvier 1922 par le ministre de la Guerre, Louis Barthou, le Général Niessel « a réussi, grâce à son ascendant personnel et à la vigueur des dispositions prises, à imposer la volonté de l’Entente au Gouvernement de Berlin et à obtenir, en dépit des multiples obstacles rencontrés, la libération rapide de la Lettonie et de la Lithuanie ».




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